La Nature est enchevêtrée, obscène, indifférente
aux consciences... Elle pousse, elle arrose, ravine, éclaire, pourrit,
entasse sans calculs ni précautions ... Ce n'est pas la bienfaitrice
que l'on croit. Nous avons été sa chose puis sa bête.
Rien n'interdit de penser qu'elle prépare une diarrhée de
basalte et de souffre dont elle a le secret, fasse sauter une mer de magma
et couvre la Terre de vingt centimètres de cendres empoisonnées...
Une caillasse de 100 km peut tomber sur nos anciens champs de bataille,
volatiliser des millions de pissotières et souffler toutes les cloches
et tous les tapis de prières... Une bactérie au look d'enfer
peut contrarier nos amours, en finir avec des milliards de bouches roses
et noircir tous les lampions de nos bals... Pour oublier les gouffres ,
nous avons inventé les spectacles. Nos chamans se sont servis de
petites fumées pour aller dans les nuages. Des prophètes ont
escaladé des montagnes pelées en quête de Terre Promise.
Les estomacs et les ventres à remplir ont fini par accomplir des
miracles. Des clairières sont apparues, des parcelles furent entourées
de haies, des huttes sont devenues des maisons, des routes ont relié
des villes et des hommes puissants bâtirent des forteresses entourées
de fossés et d'avenues... Le ciel capturé dans les bassins,
les arbres alignés comme des laquais, taillés en boule ou
en pointe, les pierres travaillées en ronde bosse... Les pauvres
et les bêtes chassés hors les murs, les faunes et les cortèges
dyonisiaques tournaient autour des châteaux , Apollon cavalait sur
son char et certaine noblesse embarquait pour Cythère tous les jours
que Dieu fait... Des couples sous les frondaisons, des violons, des habits
de soie et des poèmes... Ainsi naissent les paysages où la
"Nature" s'engourdissait de marécages, d'épines,
de ronces, où les loups chassaient le cerf, les renards parlaient
aux corbeaux, les ermites fuyaient le Diable...
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